De nombreux points négatifs et manquements ont pu apparaître en matière d’anticipation, de réactions, et même au niveau strictement médical. Cela étant, l’industrie de la santé doit regarder vers l’avenir afin d’essayer de combler ses lacunes et éventuellement rattraper son retard pour ce qui est de sa transformation digitale.
Ce que la crise du Covid-19 révèle de notre industrie de santé
Ainsi, tout le monde constate que les métiers de la santé ont subi peu de transformations et d’évolutions au cours des dix dernières années. C’est particulièrement frappant si l’on regarde ce qui s’est passé dans d’autres secteurs de service et de production comme la vente de détail, l’industrie automobile, ou l’informatique.
Cette crise sanitaire du Covid-19 peut être l’occasion de chambouler l’univers de la médecine et de l’industrie pharmaceutique en travaillant sur des pistes de travail concrètes comme l’intelligence artificielle, la transformation numérique du secteur, la création de nouveaux modèles commerciaux, etc.
Un exemple remarquable qui illustre parfaitement notre propos, c’est l’apparition de la « télé-médecine ». Regardée de haut par les médecins et considérée comme inconcevable il y a encore quelques mois, cette solution s’est imposée naturellement durant la pandémie et les chiffres de demandes de consultation en ligne ont explosé sur des plates-formes telles que Doctolib. Le leader de l’e-santé en France a ainsi enregistré une augmentation impressionnante du nombre de médecins et de patients adopter ce nouveau moyen d’envisager la relation médicale.
On a également vu les entreprises de pointe de la Heath Tech se mobiliser, notamment pour assurer les traitements de patients atteints de maladies graves, comme le cancer, et souvent obligés de rester chez eux en raison de la pandémie et des mesures de confinement.
En outre, certaines compagnies pharmaceutiques concentrent toujours actuellement leur énergie dans la recherche et le développement de traitements et d’un vaccin. Un des plus gros enjeux qui se dresse devant les fabricants pharmaceutiques, mis en lumière par la crise du Covid-19, c’est la continuité de la production et de l’approvisionnement de médicaments en période d’urgence, mais aussi la capacité à diversifier ou à augmenter leur production en fonction de l’état sanitaire à un moment donné.
La piste de l’intelligence artificielle.
L’intelligence artificielle est certainement l’avenir de la médecine, et ce pourrait être un allié fantastique des docteurs pour les assister dans de nombreuses tâches, comme le dépistage de signes symptomatiques d’un virus. Indiscutablement, L’IA constitue cet instrument très efficace qui va venir épauler l’humain dans le but d’accroître les capacités de diagnostic et d’analyses médicales. Par exemple, l’IA procure la possibilité de déceler des sous-groupes de patients ou de malades qu’il est irréaliste de pouvoir détecter dans des essais cliniques à l’heure actuelle, car certaines données telles que les biomarqueurs sont hors de portée des systèmes informatiques classiques.
L’intelligence artificielle offre des progrès substantiels en matière d’essais cliniques à la faveur d’une meilleure stratification des malades, d’une quantification des lésions sur les scanners plus performante, et d’une optimisation des combinaisons de biomarqueurs.
Tous ces éléments mis bout à bout vont améliorer la recherche et le développement thérapeutique.
Dans le domaine de l’analyse des données après la période de mise sur le marché de médicaments, l’IA peut fortement aider les institutions médicales et pharmaceutiques à mieux percevoir et comprendre les effets des traitements sur les patients.
La question de l’accès aux données médicales
Pour que l’intelligence artificielle puisse exprimer tout son potentiel, elle a besoin d’avoir recourt aux « data ». Il est intéressant de noter que le nombre de publications scientifiques a grimpé en flèche lors des dernières semaines, et ce, dans le monde entier, chaque pays souhaitant trouver un traitement, voire un vaccin en premier. Cela rend disponibles des quantités de données incommensurables, que seule l’IA pourrait avoir la capacité et la faculté de traiter dans un laps de temps raisonnable. Reste le problème de savoir comment mettre ces amas de données considérables à dispositions des chercheurs spécialisés dans l’IA, et surtout à qui les confier. Car la question de la confidentialité demeure l’un des principaux obstacles à la faisabilité d’un tel projet. Cela dit, certaines entreprises et start-up opérant dans les secteurs de pointe au niveau médical réussissent à mettre des programmes en marche, comme Okwin, une start-up française créée par un ancien chef de clinique, Thomas Clozel. Ainsi, Okwin est parvenu à concevoir un consortium européen de partage de data en open source baptisé COAI et à développer un moyen d’accéder à des data au sein d’institutions médicales sans les extraire, et donc, sans violer leur caractère confidentiel.
L’apparition de comportements nouveaux.
Durant cette période de crise sanitaire majeure qui est maintenant derrière nous, pour le moment, les patients et le personnel soignant ont découvert de nouvelles pratiques et adopté des comportements différents qui ont donné satisfaction. Nous le savions déjà, mais, est-il indispensable par exemple de devoir retourner en personne chez son médecin pour un simple renouvellement de prescription ? Quel est l’intérêt de payer une consultation à cet effet, alors que l’on pourrait convenir d’effectuer ce type de procédure par messagerie électronique, réseaux sociaux ou même par téléphone ?
En Italie, des gens se sont fait dépister dans des pharmacies, tandis qu’au Brésil, les médicaments peuvent être livrés à domicile.
Ces changements, observés dans beaucoup de pays depuis le début de l’année 2020, conduisent nos sociétés et le secteur médical en particulier, à se poser les bonnes questions et à s’orienter vers un processus de « désintermédiation », de réduction des coûts, et de réorganisation de la chaîne de l’industrie de la santé.
Par exemple, pourquoi faut-il faire appel à des laboratoires chers pour obtenir des solutions de dépistage ou de diagnostic ? Est-il vraiment nécessaire que les pharmaciens soient les seules personnes habilitées à vendre des médicaments ?
C’est pour cela que tous les acteurs de la santé doivent réfléchir et penser à de nouvelles solutions pour les années à venir qui permettraient de briser l’hégémonie du système et des valeurs actuels, particulièrement dans les domaines de la dématérialisation (acquisition et valorisation des données), de la désintermédiation (suppression des intermédiaires sans valeur ajoutée), et de la digitalisation de l’ensemble des processus de la chaîne médicale.
Verra-t-on l’émergence de nouveaux modèles de santé plus résistants et plus performants ?
L’industrie de la santé, on peut s’en plaindre, est loin d’être un modèle en termes d’innovations à grande échelle concernant l’accès aux soins. Cela est dû principalement à sa propre structuration et aux innombrables lobbys qui la composent.
Actuellement, plus de deux milliards d’êtres humains ne sont pas tous en mesure de voir un docteur et d’acheter des médicaments. Il y a donc un espoir que cette pandémie agisse comme un déclic en matière d’accès aux soins de santé et de collaboration internationale dans le domaine de la recherche médicale, à l’instar de ce qui se passe pour l’environnement.
La crise du Covid-19 nous alerte sur l’urgence de créer des services de santé locaux reliés entre eux au niveau international.
Par exemple, il est regrettable de voir que, bien que l’Institut Pasteur de Dakar soit capable de produire des solutions de respirateurs artificiels et des tests pour le Covid très bon marché, aucun investisseur d’envergure ne se jette sur l’occasion pour établir un partenariat commercial.
Ainsi, il en va de tous les secteurs de la société pour faire en sorte que l’industrie de la santé et les laboratoires pharmaceutiques se restructurent fondamentalement, et les nouvelles technologies ont un rôle prépondérant à jouer dans cette optique. Les états, l’industrie pharmaceutique, les professionnels de la médecine, et de nouveaux acteurs tels qu’Owkin doivent se mettre autour d’une table pour créer un nouveau modèle universel de santé.
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