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Beautytech : une opportunité de se connecter avec les consommateurs d’une nouvelle manière

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Au CES (Consumer Electronics Show) de Las Vegas 2020, L’Oréal a dévoilé « Perso », un appareil de soin intelligent capable d’utiliser l’IA (intelligence artificielle), les données de localisation et les préférences des utilisateurs pour formuler une crème hydratante personnalisée. L’appareil devrait être mis en vente dans le courant de l’année 2021. À priori cet appareil innovant devrait également pouvoir produire un fond de teint et un rouge à lèvres personnalisés pour les clients et surtout les clientes qui comptent l’acquérir.

Nicolas Hieronimus, le directeur général adjoint de la société numéro 1 dans le secteur de l’industrie cosmétique a affirmé à cette occasion que L’Oréal s’engageait à devenir le leader des technologies de la beauté, et que Perso était la première étape d’une aventure passionnante, prometteuse, et qui n’est pas qu’une simple tendance.

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Aujourd’hui, L’Oréal est loin d’être la seule entreprise spécialisée à s’être lancée dans les technologies de la beauté, qu’on appellera dans cet article « Beauty Tech ».

Bien que cette idée d’une technologie de la beauté remonte à la fin des années 90 (le magazine Cosmopolitan avait en 1998 mis son nom sur un logiciel de « relooking virtuel »), ce n’est que récemment que les grandes marques ont commencé à investir massivement dans ce secteur pour offrir de nouveaux types de services aux consommateurs. On a vu récemment une montée en flèche de l’intérêt affiché par le public, en grande partie due aux progrès de la technologie proposée par les smartphones, mais également du fait de la menace croissante des marques de beauté indépendantes et natives du numérique, qui augmente sans cesse leurs parts de marché et leur chiffre d’affaires en tirant parti des médias sociaux et du marketing d’influence.

À partir de là, les grands noms de l’industrie cosmétique ne peuvent pas se permettre de laisser filer ce public particulièrement jeune vers des entreprises qui viendront peut-être les concurrencer dans quelques années.

Ainsi, pour les marques établies, la Beauty Tech représente une chance de se connecter avec les consommateurs, et notamment les plus jeunes, d’une nouvelle manière. Cette opportunité a plus à voir avec les promesses qu’offrent l’IoT (internet des objets) et l’IA que la concurrence des influenceurs présents sur YouTube et Instagram. Les applications de beauté en réalité augmentée vont permettre aux utilisateurs d’essayer tous les types de rouges à lèvres d’une marque en quelques minutes, et ce, sans avoir à se déplacer ni à entrer dans un magasin. C’est ce que préfigurent les appareils intelligents comme Perso, qui donneront la possibilité aux marques d’offrir des expériences personnalisées à grande échelle, et par là même de répondre aux nouveaux besoins de leur clientèle.

L’Oréal, Shiseido et Estée Lauder sont trois des plus grandes entreprises de cosmétiques au monde, et elles font également partie des marques les plus actives dans le domaine de la Beauty Tech. Pour mieux comprendre comment la technologie va transformer l’industrie des cosmétiques, nous allons observer ce que préparent ces trois entreprises leaders et les progrès technologiques qu’elles ambitionnent de voir survenir dans un futur proche.

La nouvelle génération de Startups « Beauty Tech »

La Station F est devenue le plus grand campus de startups au monde lors de son ouverture en 2017. Les installations de Station F, basées à Paris et abritées à l’intérieur d’un ancien dépôt ferroviaire, procure l’espace nécessaire à plus de 1000 startups et accélérateurs de startups, dont L’Oréal. L’accélérateur Beauty Tech de L’Oréal fonctionne pendant six mois, une période pendant laquelle les startups disposent d’un espace de travail à Station F, d’opportunités de présentations aux investisseurs, et même d’un accès aux canaux de distribution de l’entreprise.

Maxime Garcia-Janin, fondateur de la startup de parfums personnalisés « Sillages Paris » et ancien élève du programme d’accélérateur de L’Oréal, affirme que le marché et les tendances de la beauté évoluent très rapidement à cause du numérique, et que l’évolution des technologies change toutes les règles. Selon lui, L’Oréal travaille avec des startups comme la sienne afin de mieux comprendre et appréhender les changements provoqués par la digitalisation des comportements d’achat.

En plus de travailler avec des startups, la marque française de cosmétiques les acquiert la plupart du temps, lorsqu’elles semblent prometteuses. En 2018, L’Oréal a absorbé « ModiFace », une société technologique basée à Toronto et spécialisée dans les applications portant sur la beauté incluant de la réalité augmentée. Parmi les clients de cette société canadienne, il y avait notamment les grands rivaux de L’Oréal, comme Shiseido, Estée Lauder et LVMH, le géant mondial du luxe qui détient entre autres Sephora, la chaîne de magasins de vente de parfums et de produits cosmétiques.

Cette acquisition a été vécue comme un véritable uppercut par les concurrents de L’Oréal, d’autant plus que la technologie à base d’IA que ModiFace a mise au point, et qui est capable d’établir un diagnostic de la peau et une analyse du visage, est similaire à celle qui est contenue dans l’application Perso.

Perso a été développé au sein de l’incubateur technologique de L’Oréal, lancé en 2012 et composé de physiciens, d’ingénieurs, de spécialistes UX, de concepteurs produit et de spécialistes des data. Avant de s’attaquer à Perso, l’ensemble de l’équipe développait aussi des produits en rapport avec le monde de la beauté. On peut citer par exemple un appareil portable capable de détecter les UV, une application de miroir en réalité augmenté, ainsi qu’une brosse à cheveux intelligente, le tout conçu en collaboration avec la société française Withings, qui développe et commercialise des objets connectés.

Pour Guive Balooch, responsable de l’incubateur technologique de L’Oréal, « l’objectif ultime est de créer des produits et des solutions que les consommateurs ne considèrent pas comme de simples technologies, mais comme des éléments essentiels de leur vie quotidienne ».

Créer une connexion personnelle avec des appareils intelligents

La marque Shiseido n’était quant à elle pas présente au CES 2020, mais ce n’est pas pour ça qu’elle est en retard sur L’Oréal au niveau technologique. En fait, Shiseido a également sorti son propre appareil de soin intelligent, nommé « Optune », six mois avant le CES de Las Vegas. Cet équipement partage d’ailleurs de nombreuses similitudes avec Perso.

Les deux machines utilisent l’intelligence artificielle pour analyser les photos du visage d’un utilisateur, dans le but de détecter d’éventuels problèmes cutanés et d’associer ces informations aux données météorologiques et de pollution de l’air basées sur l’emplacement de l’utilisateur. La finalité étant de créer une crème hydratante personnalisée en cliquant simplement sur un bouton !

Cependant, Optune peut également intégrer des données supplémentaires dans son analyse, notamment concernant le temps de sommeil et des informations sur les niveaux de stress et les cycles menstruels. Ce produit, Optune, a pu être mis au point grâce à l’association de deux sociétés technologiques acquises en 2017, MATCHCo et Giaran. Il est disponible au public, sur la base d’un abonnement qui coûte 10 000 yens par mois, soit un peu moins de 80 €.

Contrairement à L’Oréal, Shiseido n’a pas déclaré son intention de devenir un leader dans le domaine de la Beauty Tech lors du lancement d’Optune. Le géant des cosmétiques japonais se concentre plutôt sur la manière dont la technologie peut faire de sa marque et de ses produits un leader dans le secteur des soins personnalisés pour le visage et pour la peau.

Dans une interview accordée il y a peu au Nikkei Asian Review, le président de Shiseido, Masahiko Uotani a déclaré qu’aucune entreprise de cosmétiques n’avait à ce jour été en mesure d’intégrer une personnalisation intégrale dans ses modèles commerciaux. Et d’ajouter que si Shiseido était en tête dans ce domaine, ils pourraient probablement devancer le leader mondial du secteur, L’Oréal.

Des produits comme Optune sont conçus et mis au point au « Shiseido Global Innovation Centre, situé à Yokohama, au Japon. Pour des raisons évidentes, de nombreux laboratoires d’innovation d’entreprise fonctionnent dans le plus grand secret et ne sont pas ouverts au public. Shiseido a adopté une approche opposée, en donnant au public la possibilité d’accéder aux deux premiers étages du centre. En plus d’abriter un musée, un café et un studio de remise en forme, ce grand complexe permet aux visiteurs de discuter avec des chercheurs de l’entreprise et de découvrir les dernières nouveautés technologiques de la marque.

Bien que Shiseido n’ait pas acquis d’entreprise technologique depuis 2017, elle est toujours active dans le domaine des startups. Son fonds de capital-risque, Shiseido Venture Partners, a déjà réalisé quatre investissements dans deux entreprises depuis sa création en 2016. Le fonds de capital-risque de Shiseido se concentre avant tout sur l’impact que la technologie peut avoir sur ses clients.

Lors d’un entretien avec le magazine Forbes, Marc Rey, le directeur de la croissance chez Shiseido, a déclaré que l’entreprise japonaise était extrêmement pointilleuse concernant le niveau de qualité et d’innovation des startups dans lesquelles elle souhaitait investir. Pour Rey, le plus important, et ce qui intéresse Shiseido, c’est autant la promesse et la vision annoncées par la startup que la technologie qui est mise en œuvre. La technologie n’est indispensable que si elle peut apporter un service innovant et un changement véritable pour le consommateur. »

Un comptoir de maquillage qui fonctionne grâce aux réseaux sociaux

La plateforme de médias sociaux chinoise WeChat était encore relativement inconnue aux États-Unis il y a peu de temps. Les statistiques sur le nombre d’utilisateurs sont difficiles à obtenir, mais on estime qu’en juillet 2018, la plateforme comptait environ 2,5 millions d’utilisateurs actifs par mois aux États-Unis. Cinq mois plus tard, WeChat a annoncé qu’il comptait 1 milliard d’utilisateurs actifs quotidiens dans le monde. Et bien que WeChat ne soit pas aussi important que Facebook ou Instagram aux États-Unis, l’application de réseau social chinoise a attiré l’attention de la marque de cosmétique new-yorkaise Estée Lauder.

Dans le magasin de l’entreprise originaire de New York situé au MAC Shanghai Store, les clients prennent des rendez-vous et reçoivent des recommandations en temps réel d’influenceurs via WeChat. En outre, ils peuvent payer leurs achats en utilisant WeChat. Le magasin propose également des tests virtuels et permet aux clients de créer des produits personnalisés, imprimés en 3D en magasin.

Tricia Nichols, l’ancienne vice-présidente du marketing grand public pour le groupe Estée Lauder explique que l’engagement du public chinois vers la marque de cosmétiques américaine s’effectue via la plateforme WeChat, qui couvre les marques de luxe en Chine. Elle ajoute qu’en Chine, WeChat est un outil indispensable pour convertir les gens intéressés par les produits Estée Lauder en clients.

C’est bel et bien la plateforme chinoise qui permet au groupe new-yorkais d’amener son audience en ligne vers des points d’achat physiques.

Les partenariats ont été un élément important de la stratégie de Beauty Tech initiale d’Estée Lauder. La société s’était auparavant associée à Perfect Corporation, le concepteur et fabricant de l’application « YouCam Makeup », pour lancer des tests de rouge à lèvres virtuels ainsi que des programmes de formation en réalité augmentée pour ses conseillers beauté en magasin.

Bien qu’Estée Lauder n’ait pas encore lancé d’appareil intelligent, son département technique, qui était auparavant réparti dans huit bureaux différents à New York, a été récemment réorganisé. Il y a maintenant deux bureaux, l’un à Long Island et l’autre dans le quartier voisin du Queens. Le bureau du Queens abrite le premier laboratoire d’innovation d’Estée Lauder et accueille également un « hackathon » annuel, une compétition d’une durée de 24 heures où des étudiants et des professionnels doivent créer un produit ou un équipement à forte teneur en technologie, et capable d’aider à stimuler les efforts de développement durable de l’entreprise.

Dans une interview accordée à CNBC, Michael Smith, le CIO d’Estée Lauder, a déclaré que ce hackathon offrait à l’entreprise à la fois l’occasion de s’engager avec la communauté technologique au sens large, mais également de mettre la barre plus haute en termes d’innovation.

Pour lui, il est important de comprendre qu’il y a des tendances où la transformation d’une entreprise nécessite un soutien externe. Les idées de produits qui germent pendant le hackathon sont utilisées pour approfondir la vision stratégique du groupe Estée Lauder en matière d’informatique et de technologie, et pour apporter de nouvelles idées aux différentes équipes de l’entreprise.

Contrairement à certaines entreprises établies dans d’autres secteurs, L’Oréal, Shiseido et Estée Lauder ne semblent pas avoir l’ambition de devenir des entreprises technologiques à part entière. Pour l’industrie des produits cosmétiques et de la beauté en général, la technologie sert de moyen pour atteindre une fin, que ce soit pour se connecter avec les consommateurs de façons nouvelles et inédites, ou pour fournir des produits plus personnalisés aux consommateurs. Mais la poursuite de ces objectifs fait de toute façon avancer l’industrie des technologies de la beauté à un rythme qui pourrait bientôt aboutir à ce que les applications de beauté utilisant la RA et les appareils de soins de la peau intelligents deviennent la norme dans ce secteur d’activité.

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